135 euros, 3 points, beaucoup d’automobilistes adeptes des vitres teintées espéraient une censure de l’interdiction posée par le décret d’avril 2016. Raté, le Conseil d’Etat vient de se prononcer juste avant l’entrée en vigueur au 1er janvier 2017.
Par Jean-Baptiste le Dall, Avocat à la Cour, Docteur en droit
L'article 27 du décret n° 2016-448 du 13 avril 2016 vient de modifier l’article R. 316-3 du Code de la route qui précise désormais que « les vitres du pare-brise et les vitres latérales avant côté conducteur et côté passager doivent en outre avoir une transparence suffisante, tant de l'intérieur que de l'extérieur du véhicule, et ne provoquer aucune déformation notable des objets vus par transparence ni aucune modification notable de leurs couleurs. La transparence de ces vitres est considérée comme suffisante si le facteur de transmission régulière de la lumière est d'au moins 70 %. »
Ce texte découragera, à l’avenir, les amateurs de vitres opaques mais concerne également les véhicules déjà en circulation équipés de films opacifiants sur le vitrage avant. C’est pour cette raison qu’il a été prévu que la mesure n’entre pas en application immédiatement, histoire de laisser le temps aux automobilistes concernés de faire retirer le dit film…
Depuis, les rumeurs les plus folles ont couru sur la légalité de la mesure, du respect au droit de la vie privée, au principe de libre circulation au sein de l’Union européenne en passant, bien évidemment, par les difficultés pratiques en matière de contrôle et de verbalisation.
La mesure introduite par le décret du 13 avril 2016 a effectivement fait cogiter quelques juristes et avocats, la raison est assez simple à comprendre : les entreprises spécialisées dans la pose de ces films risquent fort de voir cette activité péricliter en 2017…
Le Conseil d’Etat a, donc, pu se pencher sur cet article R316-3 version 2017. Une première prise de position en référé ne laissait pas forcément présager d’une issue défavorable sur le fond.
Pour cette première décision le Conseil d'État avait choisi de se focaliser sur l’urgence qui est l’un des critères en matière de référé. Plusieurs entreprises spécialisées dans la pose de films avaient invoqué un péril économique imminent en soulignant que la plupart des véhicules présentent dès la sortie d'usine un taux de transmission de la lumière au maximum des tolérances prévues par le décret du 13 avril 2016… Plus donc de possibilité de poser un film sur un véhicule aux vitres déjà teintées et plus donc de travail pour ces entreprises… Mais pour le Conseil d’Etat, ces entreprises n'avaient « pas été en mesure d'apporter d'élément permettant d'établir la baisse alléguée de leur activité et les risques de fermeture en découlant ». Pas de référé (CE, N° 403539, 17 octobre 2016).
Un espoir demeurait, toutefois, avec l’examen au fond des dispositions de l’article R316-3. La chose n’ayant toujours pas été jugée alors que le 1er janvier approchait, certains s’étaient pris à rêver d’un beau cadeau de Noel. Raté ! Lle père fouettard est passé le 30 décembre…
Les forces de l’ordre vont pouvoir commencer à verbaliser, pas de problème, tout du moins au niveau légal. Car, dans la pratique, se pose quand même encore une question comment les agents vont-ils pouvoir constater une infraction relative au facteur de transmission régulière de la lumière à l’œil nu ?
Le père Noel n’est pas passé dans les commissariats et gendarmerie qui ne disposent pas aujourd’hui du moindre appareil ad hoc. Les contestations risquent donc d’être nombreuses et ce d’autant plus que les sanctions ne sont pas anodines : 135 euros et surtout 3 points de permis de conduire en moins pour le conducteur.
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