Les dernières déclarations du Ministre de l'Intérieur ce dimanche confirment une chose : en matière de politique de sécurité routière, le gouvernement navigue à vue !
Claude Guéant a, en effet, annoncé la mise en service de 1000 radars « pédagogiques ». Ces appareils indiqueront seulement à l'automobiliste une vitesse trop élevée, mais n'entraîneront pas de verbalisation.
Il n'y a même pas deux semaines le gouvernement annonçait à l'issue du Comité interministériel pour la sécurité routière ( le 11 mai 2011) toute une série de mesures plus ou moins opportunes en matière de sécurité routière. Parmi ces mesures : la suppression des panneaux signalant la présence d'un radar automatique. Et les suppressions n'ont pas tardé, certaines préfectures n'attendant même pas la publication au Journal Officiel de l'arrêté opérant la dite suppression...
Avec la disparition programmée de ces panneaux, le gouvernement se prive d'un formidable outil de prévention routière. Ces panneaux permettaient, en effet, d'informer l'automobiliste de son arrivée sur une portion dangereuse. La présence de ce panneau entraîne un respect scrupuleux de la limitation de vitesse par les automobilistes qui ont la certitude absolue de se faire verbaliser au moindre écart...
Les nombreuses prises de position des différentes associations d'automobilistes n'y feront rien (tout du moins pour l'instant), le Ministre de l'Intérieur reste droit dans ses bottes jusqu'à son annonce dominicale. Mais avec la mise en service de «radars pédagogiques » le gouvernement opère un revirement à 180°.
Ces "radars pédagogiques" seront d'après le Ministre de l'Intérieur "placés notamment dans les zones dangereuses, y compris sur des itinéraires dans lesquels des radars existent "( NDLA : ouf, il aurait été possible d'en déduire que les radars automatiques n'étaient pas positionnés sur des zones dangereuses!). 'Ils permettront à l'automobiliste de "lever le pied".
Traduction, le Ministre voudrait faire exactement la même chose que ce pratiquait jusqu'à aujourd'hui avec les radars automatiques signalés par un panneau, mais avec des radars qui ne verbalisent pas !
Bref une logique incompréhensible puisque dans le même temps le Ministre a rappelé qu'il ne reviendrait pas la décision de suppression des panneaux.
Claude Guéant a bien entendu affirmé que son « but n'est pas de sanctionner", et a ajouté avoir "l'espoir que les radars automatiques ne produisent plus rien un jour, ce qui voudra dire que notre politique a réussi".
Difficile de ne pas sursauter à l'écoute de cette dernière phrase, lorsque l'on a, encore, à l'esprit les conclusions du rapport d'Hervé Mariton, publié en novembre dernier, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011. Rappelons que ce rapport soulignait la baisse du "montant annuel du produit des amendes forfaitaires issu du contrôle automatisé (...), à 435 millions d'euros contre 469 millions" en 2010. Un précédent rapport d'Hervé Mariton prévoyait, déjà en 2009, que le "surplus de recettes du système des radars par rapport à ses coûts d'exploitation pourrait s'annuler dès 2017".
Nous n'oserons, bien évidemment, pas suggérer au Ministre de l'Intérieur de rester totalement inactif jusqu'en 2017 s'il souhaite pouvoir se féliciter de ses succès, mais nous ne manquerons pas de nous interroger sur les raisons d'un tel revirement. Je regrettais plus haut l'absence de logique de la part du gouvernement, mais peut être suis-je trop naïf. Peut être existe-il, derrière ces prises de décisions, une logique électoraliste ou financière ???
Tribune Le + Nouvel Observateur
Jean-Baptiste le Dall,
Avocat à la Cour
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