Malgré les différentes actions menées par les opérateurs, et les déclarations dominicales du Ministre de l'intérieur, beaucoup d'interrogations subsistent encore sur la décision d'interdiction des avertisseurs de radars.
Une première interrogation tout d'abord : quels appareils seront interdits ?
La décision d'interdiction prise dans le cadre du Comité interministériel pour la sécurité routière (11 mai 2011) reste, pour l'instant au simple stade de la déclaration d'intention.
Parmi les mesures décidées lors du dernier CISR, certaines pourront être appliquées directement, d'autres nécessiteront un texte réglementaire ou législatif. Les choses peuvent aller très vite, en témoigne la publication au JO de l'arrêté supprimant les panneaux signalant un radar automatique à peine plus d'une semaine après le CISR.
Dans l'attente d'un texte interdisant l'utilisation des avertisseurs de radars, nous restons, à ce jour, sans certitude quant au champ d'application d'une telle mesure. Il est clair qu'elle portera sur les avertisseurs de type communautaire (dont les fabricants se sont regroupés au sein de l'AFFTAC). Mais d'autres appareils permettent également la géolocalisation des radars. Nous pensons immédiatement au GPS. La géolocalisation des radars par GPS est plus moins « active » : active lorsque les possesseurs d'un même type de GPS ont la possibilité de s'informer sur la présence d'un radar (on se rapproche alors de l'avertisseur) ou passive lorsqu'une carte des radars fixes a été préinstallée lors de la conception de l'appareil... Si le champ d'application de la mesure d'interdiction est large, ce sont en fait presque tous automobilistes qui demain seront concernés par cette mesure, bien au-delà des près de 6 millions d'utilisateurs (c'est déjà énorme) d'avertisseurs recensés par l'AFFTAC.
Demain, tous les possesseurs de GPS risquent, donc, de devoir mettre à la poubelle (NDLA :au tri sélectif) leurs appareils !
Et nous ne parlons pas des appareils installés en première monte dans de nombreux véhicules...
Autre interrogation : l'applicabilité d'une telle mesure
Certains juristes ont évoqué une éventuelle inconstitutionnalité de cette mesure au regard, notamment, d'une liberté de communication... On verra ce qu'il adviendra d'une telle argumentation avec un arbitrage à effectuer entre liberté de communiquer d'une part, et sécurité publique d'autre part.
Mais au-delà de ce questionnement, se pose le problème de l'applicabilité d'une telle interdiction.
La fouille des véhicules, demeure, en effet extrêmement encadrée avec une présence presque systématique d'un OPJ. La fouille d'un véhicule ne peut intervenir que dans certaines circonstances. On pense, par exemple, aux situations visées aux articles 78-2-3 et 78-2-4 du Code de procédure pénale.
Article 78-2-3 du Code de procédure pénale
« Les officiers de police judiciaire, assistés, le cas échéant, des agents de police judiciaire et des agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l'article 21, peuvent procéder à la visite des véhicules circulant ou arrêtés sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public lorsqu'il existe à l'égard du conducteur ou d'un passager une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'il a commis, comme auteur ou comme complice, un crime ou un délit flagrant ; ces dispositions s'appliquent également à la tentative. »
Article 78-2-4 du Code de procédure pénale
« Pour prévenir une atteinte grave à la sécurité des personnes et des biens, les officiers de police judiciaire et, sur l'ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et les agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l'article 21 peuvent procéder non seulement aux contrôles d'identité prévus au septième alinéa de l'article 78-2 mais aussi, avec l'accord du conducteur ou, à défaut, sur instructions du procureur de la République communiquées par tous moyens, à la visite des véhicules circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public.
Dans l'attente des instructions du procureur de la République, le véhicule peut être immobilisé pour une durée qui ne peut excéder trente minutes. »
La simple lecture de ces deux articles permet rapidement de comprendre que la mise en place de contrôles et de fouilles visant à trouver à un appareil de type avertisseur de radars risque de s'avérer compliquée...
Jusqu'à preuve du contraire, la simple possession d'un téléphone portable ne doit pas pouvoir suffire à soupçonner un automobiliste d'un crime ou d'un flagrant délit....
A consulter l'intervention de Maître le Dall au micro de France 3
JT 13h 21 mai 2011
Jean-Baptiste le Dall,
Avocat à la Cour
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