Le Sénat a adopté hier contre l'avis du gouvernement, dans le cadre du projet de loi Loppsi 2, un amendement qui réduit sensiblement les délais de reconstitution de points après une infraction au Code de la route.
Aujourd'hui le système du permis à points qui n'a pratiquement pas été retouché depuis 1989 impose à l'automobiliste un délai de trois ans sans infraction - ayant entraîné retrait de point- pour pouvoir récupérer ses points perdus.
L'amendement adopté hier par le Sénat réduit considérablement ce délai avec notamment un abaissement du délai de « droit commun » à un an.
Les problématiques de délais de reconstitution du capital de points sont bien évidemment extrêmement importantes pour les automobilistes. En effet le système imaginé en 1989, l'a été au regard des conditions de circulation et surtout de verbalisation de l'époque. Ces dernières n'ont bien évidemment rien de commun avec celles que l'on connait aujourd'hui avec une politique de verbalisation très stricte (quotas de pv, implantation en masse de cabines radars automatisées...).
Les risques d'invalidation de permis pour perte de l'ensemble des points sont donc bien plus élevés que dans les années 1990. Et au delà de la simple perte de points consécutive à une infraction, c'est surtout ce délai de reconstitution de trois ans qui amène les automobilistes à l'invalidation. Plus que la perte d'un ou deux points, c'est en effet le nouveau délai de trois qui recommence à courir à chaque infraction même minime qui pose problème. Certains automobilistes, et notamment ceux qui roulent beaucoup ne parviennent jamais à récupérer leurs points et le plus souvent à cause de toutes petites infractions.
Le passage de trois à un an permettrait à bon nombre d'automobiliste de retrouver leurs 12 points et ainsi éviter l'invalidation.
Le sénateur Alain Fouché à l'origine de l'amendement a expliqué vouloir répondre « à la préoccupation de milliers de nos concitoyens sévèrement punis pour de légers délits et la réduction des délais contribuera à réduire les échanges de points entre membres d'une même famille et la conduite sans permis »,
L'adoption de cet amendement a bien évidemment suscité une réaction négative du ministère de l'Intérieur et de la commission des Lois . La pérennité de cet amendement est donc loin d'être assurée.
On ne peut toutefois que se satisfaire de son adoption par le Sénat, il traduit une véritable prise de conscience de la part des parlementaires qui aujourd'hui prouve qu'ils ont compris la nécessité de revoir un système qui n'a jamais été repensé depuis 20 ans et entraîne chaque années des dizaines d'invalidations de permis avec toutes les conséquences que l'on connaît : conduite sans permis, pas de prise en charge par les assurances en cas d'accident, licenciement...
Et si le rapporteur de la commission Jean-Patrick Courtois a indiqué ne pas se montrer favorable à cet amendement, il a surtout admis que la porte était désormais ouverte à une évolution : « Je suis défavorable à cet amendement comme aux autres parce que je pense que le rétablissement du permis blanc, avec un relèvement des seuils, est une meilleure solution, en particulier pour la conduite sans permis ».
Au delà de cet amendent qui subira les foudres de certains, le coup de force du Sénat conduira sans aucun doute à un réel débat et espérons le à une évolution...
Jean-Baptiste le Dall,
Avocat à la Cour
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