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L'AVOCAT DU PERMIS

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Jean-Baptiste le Dall, Avocat, Docteur en droit anime et dirige l'un des rares cabinets d’avocats tourné vers le droit automobile.

 

Président de la Commission ouverte droit routier du barreau de Paris, et Directeur scientifique des Etats généraux du droit automobile, Maître le Dall commente le Code de la route aux Editions Argus de l’assurance.

 

Auteur de nombreux écrits et d’ouvrages de référence en la matière comme le « contentieux de la circulation routière » aux Editions Lamy « Réglementation automobile » (Argus de l’Assurance), le Guide du véhicule de collection (ETAI), il  est membre du comité de pilotage du périodique spécialisé « La Jurisprudence automobile ». Vous pouvez également retrouver chaque semaine Me le Dall pour la chronique auto sur lci.fr

 

Confronté quotidiennement aux problématiques très spécifiques du permis à points, le cabinet d'avocats LE DALL mettra à votre service toutes ses compétences et son expérience pour préserver vos droits et surtout votre permis de conduire. 

 

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22 octobre 2019 2 22 /10 /octobre /2019 16:06
Ferrari 250 GTO, un modèle au coeur des débats au tribunal correctionnel de Guéret

Ferrari 250 GTO, un modèle au coeur des débats au tribunal correctionnel de Guéret

Héritage ou confiscation comment détermine-t-on la propriété d’un véhicule ?

 

Cass. Crim. , 11 septembre 2019, n°19-80.300

 

Par Jean-Baptiste le Dall, Avocat à la Cour, Docteur en Droit, Président de la Commission ouverte droit routier du Barreau de Paris

 

Le certificat d’immatriculation (qui a remplacé la carte grise) n’est pas un titre de propriété, un conducteur peut donc se faire confisquer par la justice un véhicule qui n’est pas à son nom s’il en est réellement le propriétaire.

 

Deux décisions viennent cette année d'illustrer la problématique de la propriété du véhicule qui concerne, dans la pratique, souvent des questions de confiscation du dit véhicule ? C'est d'ailleurs à ce sujet que la Chambre criminelle a pu récemment réaffirmer sa jurisprudence. Mais l'affaire qui a réellement marqué la jurisprudence en matière automobile a été tranchée par le tribunal correctionnel de Guéret dans le cadre de la succession Bardinon avec comme objet du litige un véhicule qui a fait immédiatement rentrer cette affaire dans les annales : une rarissime  Ferrari 250 GTO de 1964.

 

Une jurisprudence ancienne sur la nature du certificat d’immatriculation

 

Dans son arrêt du 11 septembre 2019, la Cour de cassation rappelle que le certificat d'immatriculation n'est pas un titre de propriété. La jurisprudence n'est pas nouvelle, la position de la Cour de cassation était déjà identique à l'époque où le document administratif portait encore le nom  de carte grise. L'arrivée du certificat d'immatriculation en 2009 a pu un instant faire douter le profane de la nature du document avec la présence de mentions de « propriétaire » pouvant porter à confusion. Sans surprise puisque le véhicule demeure un bien meuble dont la possession vaut titre, la Cour de cassation n'a pas fait évoluer sa jurisprudence avec l'arrivée du certificat d'immatriculation.

 

Le certificat d'immatriculation n'est qu'un simple titre de police dont le défaut d'établissement ou de  détention pourra entraîner des sanctions, mais il ne s'agit pas d'un titre de propriété.

 

Et en matière de véhicule, il n'existe pas de titre de propriété, se pose donc régulièrement la question de la propriété de telle ou telle voiture, tel ou tel camion...

 

La question peut bien évidemment se poser pour des deux-roues mais bien elle se posera avec d'autant d'acuité que la cote du véhicule grimpe.

 

Une jurisprudence appliquée par les juridictions du fond 

 

Et la 250 GTO de 1964 (36 exemplaires produits dont seulement 3 cette année-là) qui était au cœur des débats à Guéret avait atteint des sommets puisqu'elle avait été cédée pour la somme de 36 millions d'euros.

 

Cette Ferrari faisait partie de la fabuleuse collection Bardinon du nom du passionné qui a réuni une cinquantaine de  modèles du cheval cabré parmi les plus mythiques (dont trois 250 GTO, une 250 châssis court en aluminium, une 335 S Spider Scaglietti de 1957,  une 312P (ex-P.Rodriguez-D.Piper) (n°0870), une 330 P4 (n°0860) une 275 P…) pour en faire une sorte de catalogue raisonné validé  par le commendatore lui-même. Quand on demandait à Enzo Ferrari pour quoi il n'avait pas conservé certains de ses modèles... il  répondait : pas besoin, Bardinon l'a fait pour moi... Cette anecdote permet au plus hermétique à la chose automobile de saisir le caractère exceptionnel de la collection Bardinon.

 

En 1978, un des fils de Pierre Bardinon, Patrick réchappe par miracle d’un accident sur le circuit du Nürburgring alors qu’il pilotait une formule 3. C’est à la suite de cet accident que Pierre Bardinon fera établir la carte grise de la fameuse 250 GTO au nom de son fils Patrick dont il était proche partageant notamment une même passion pour l’automobile. Estimant que cette passion qu’il a transmise à son fils aurait pu lui coûter la vie, Pierre Bardinon aurait fait cadeau à son fils de la 250 GTO. C’est en tout cas la thèse défendue par Patrick Bardinon. Les autres héritiers expliquent, eux que leur père faisait mettre ses voitures au nom de ses enfants, une fois l’un, une fois l’autre sans réelle intention d’en transmettre la propriété à un enfant plus qu’à un autre.

 

Sans surprise, les héritiers s’estimant lésés ont souhaité récupérer une partie du fruit de la cession et c'est ainsi que les magistrats de Guéret ont pu se pencher sur cette affaire, la question d'un éventuel abus de confiance justifiant le regard du juge pénal.

 

Assez logiquement les autres héritiers ont souligné que la carte grise ne pouvait valoir titre de propriété. Et c‘est ce que n’a pas manqué de soutenir également le procureur lors des débats des 13 et 14 décembre 2018.  La carte grise, établie au nom de Patrick Bardinon, « n’est pas un titre de propriété ».

 

La méthode du faisceau d’indices

 

Qu’il s’agisse d’une exceptionnelle Ferrari ou de la voiture moins désirable d’un prévenu à qui il serait reproché quelques délits routiers, la méthode retenue par une juridiction pour déterminer la propriété d’un véhicule sera toujours la même : celle du faisceau d’indices.

 

Les magistrats vont accumuler les indices : qui a signé le bon de commande du véhicule, qui a effectué le règlement, qui a emprunté pour financer le véhicule, qui rembourse le prêt contracté pour l’achat du véhicule, au nom de qui est-il assuré, qui paye le contrat d’assurance, qui entretient  véhicule (quel est le nom indiqué sur les factures du concessionnaire, ou du réparateur, du contrôle technique…) qui conserve ou héberge le véhicule…

 

Bien évidemment le certificat d’immatriculation (ou à l’époque, la carte grise) peut constituer l’un de ces indices…

 

Tourner sept fois sa langue dans sa bouche…

 

Et comme ne manque pas de le rappeler la Chambre criminelle dans son arrêt du 11 septembre 2019, les propres déclarations du propriétaire présumé pourront peser lourd dans la balance…

 

« Dans son audition par les enquêteurs, le prévenu a déclaré que ce véhicule lui appartenait et qu'il en payait le crédit ». Dans cette affaire, le conducteur avait tenté d’échappé à la confiscation  de son véhicule « Porsche ayant servi à commettre l'infraction de conduite en ayant fait usage de stupéfiants » en expliquant que le certificat d ‘immatriculation n’était pas établi à son nom… argument qui n’a, sans surprise, pas fait mouche….

 

A noter : la confiscation est une peine pouvant être prononcée en présence d’un grand nombre de délits routiers. En l’absence d’immobilisation et d’antécédent, cette peine n’est pas fréquemment prononcée. Attention, elle devient, en théorie, obligatoire en présence de certains délits routiers, notamment ceux commis en état de récidive légale.

 

Illustration : 250 GTO par Jan Paulussen de Pixabay

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