La chose était entendue depuis le comité interministériel de la sécurité routière (CISR) du 2 octobre 2015 mais vient seulement de prendre corps aujourd’hui avec la publication au Journal Officiel de deux textes qui rendent obligatoire le port de gants homologués à deux roues.
Les textes :
Par Jean-Baptiste le Dall, Avocat à la Cour, Docteur en Droit
La mesure 15 du CISR d’octobre 2015 « afin de limiter les blessures graves, rendre obligatoire le port de gants homologués pour les usagers de deux-roues motorisés » avait le mérite de faire porter les réflexions en matière de lutte contre l’insécurité routière sur autre chose que la vitesse. La question de l’équipement semble, en effet, aujourd’hui incontournable lorsque l’on réalise qu’une large part de la baisse de la mortalité sur la route provient des améliorations constantes en matière de sécurité active et passive des véhicules.
Les motards et autres usagers de deux roues ne pouvant compter sur une salvatrice carrosserie ne reste que l’équipement de l’usager. L’action du gouvernement se porte aujourd’hui sur le port des gants, dont le transport par les usagers est évidemment plus simple qu’une protection dorsale pour le coup sans doute plus pertinente en matière de sécurité. Le contrôle visuel, aisée, du port des gants présente, lui aussi, un avantage pour l’application de la mesure sur le terrain par les forces de l’ordre.
Demeurait, toutefois, la question de la sanction de cette mesure. En matière d’équipements obligatoires, le Code de la route réserve parfois quelques surprises, on pense notamment à l’éthylotest dont l’absence n’est nulle part sanctionnée.
Pour le port des gants, le parallèle a été fait dès la présentation des mesures du CISR avec le casque. « Les usagers de deux-roues motorisés n’ont fait l’objet que d’une seule mesure spécifique de protection corporelle, adoptée le 1er juillet 1973 : le port obligatoire du casque ». Et effectivement les textes publiés au JO le 20 septembre 2016 viennent mettre en place un encadrement très proche de celui existant concernant le port du casque. Fallait-il aller jusqu’à envisager une sanction aussi lourde pour les gants ? Certains n’y étaient, bien évidemment, pas opposés. Il sera rappelé que le non port du casque fait encourir une contravention de quatrième classe et une décision de retrait de trois points sur son permis de conduire (Cf. article R431-1 du Code de la route). En 2003, le nombre de points retiré a été porté de 1 à 3 (une telle modification avait également été opérée pour le défaut de port de la ceinture de sécurité). A l’époque cette évolution n’avait pas manqué de susciter certaines interrogations, le barème administratif de retrait de points de permis de conduire pensé par le législateur en 1989 reposait sur un critère de dangerosité. Clairement, ne pas porter de casque ou se dispenser du port de la ceinture ne présente pas véritablement de danger pour les autres usagers, même s’il représente néanmoins un coût financier pour la société du fait de la prise en charge du blessé.
Pas de gants = 1 point en moins
A ce titre, fixer à trois le nombre de points retirés pour un défaut de port de gants homologués pouvait sembler excessif. Le choix du gouvernement de limiter la perte à un seul point pourra soulager les usagers de deux roues les plus distraits. Ils pourront, également, se rassurer à la lecture des dispositions de l’article L223-6 du Code de la route qui précisent qu’ « en cas de commission d'une infraction ayant entraîné le retrait d'un point, ce point est réattribué au terme du délai de six mois à compter de la date mentionnée au premier alinéa, si le titulaire du permis de conduire n'a pas commis, dans cet intervalle, une infraction ayant donné lieu à un nouveau retrait de points. »
Mais une décision de retrait de point, aussi faible soit-elle, demeure une décision de retrait de point. Et même dans l’hypothèse où ce point aurait été réattribué elle entrainera le départ d’un nouveau délai de trois ans pour les précédentes décisions de retrait de points ou empêchera un conducteur novice de prétendre au bonus annuel de deux ou trois points.
Une amende de 68 euros
Le pouvoir réglementaire a choisi de punir le défaut de port de gants de l'amende prévue pour les contraventions de la troisième classe (amende forfaitaire minorée de 45 euros en cas de paiement dans les 15 jours, amende forfaitaire de 68 euros pour un paiement dans les 60 jours et amende forfaitaire majorée de 180 euros). Peut-être eut-il été plus juste d’opter pour une amende d’un montant plus élevé et d’épargner au contrevenant la décision de retrait de point. Le débat reste ouvert… Mais il est évident que même avec une amende de troisième classe, toute considération liée à la sécurité routière laissée de côté, l’investissement sera très vite amorti pour ceux qui ne sont pas déjà équipés.
Le cadre réglementaire
Le dispositif mis en place par le décret n°2016-1232 du 19 septembre 2016 est très proche de ce qui se pratique pour le port du casque ou de la ceinture : perte de points uniquement pour le conducteur, et uniquement pour la conduite d’un véhicule nécessitant la détention du permis de conduire, et des passagers passibles de l’amende sans perte de points.
L’équipement
Pas question de fouiller les placards pour y dénicher une paire de gants de ski ou une paire de moufles dépareillées. Les gants dont le port vient d’être rendu obligatoire à compter du 20 novembre 2016 doivent « respecter les caractéristiques des gants pour motocyclistes conformes à la réglementation relative aux équipements de protection individuelle et être revêtus du marquage CE. » (Cf. Arrêté du 19 septembre 2016 relatif aux caractéristiques des gants portés par les conducteurs et les passagers de motocyclette, de tricycle à moteur, de quadricycle à moteur ou de cyclomoteur)
En la matière, la norme « EN 13594:2015 » est venue remplacer, en décembre 2015, l’ancienne norme EN 13594:2002 avec désormais une exigence de durée de résistance à l’abrasion de 4 secondes pour le niveau 1 (contre 1,5 s auparavant) et de 8 secondes pour un niveau 2.
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