L’habitude a été prise depuis de nombreuses années de faire passer les couleuvres aux automobilistes discrètement pendant les mois d’été. 2015 n’échappe pas à la règle, le mois de juillet est à peine entamé que déjà arrive (au JO du 4 juillet) l’infraction d’arrêt ou de stationnement très gênant pour les véhicules à moins de 5 mètres d’un passage piéton.
Jean-Baptiste le Dall, Avocat à la Cour, Docteur en Droit
La notice du décret n° 2015-808 du 2 juillet 2015 « relatif au plan d'actions pour les mobilités actives et au stationnement » est très claire : « le décret vise à sécuriser et à développer la pratique de la marche et du vélo. Il améliore le respect des cheminements piétons et des espaces dédiés aux cyclistes, en aggravant les sanctions en cas d'occupation par des véhicules motorisés. Il interdit l'arrêt ou le stationnement à cinq mètres en amont du passage piéton (en dehors des places aménagées) pour accroître la visibilité entre les conducteurs de véhicules et les piétons souhaitant traverser la chaussée… »
Et effectivement les lecteurs assidus du Code de la route pourront se délecter d’un article R417-11 qui précise qu’est « considéré comme très gênant pour la circulation publique l'arrêt ou le stationnement :
5° D'un véhicule sur les passages réservés à la circulation des piétons en traversée de chaussée ; (…)
7° D'un véhicule à proximité des signaux lumineux de circulation ou des panneaux de signalisation lorsque son gabarit est susceptible de masquer cette signalisation à la vue des usagers de la voie…
8° c) Sur une distance de cinq mètres en amont des passages piétons dans le sens de la circulation, en dehors des emplacements matérialisés à cet effet, à l'exception des motocyclettes, tricycles et cyclomoteurs «
A la clé une amende forfaitaire de 135 euros et un tour à la fourrière.
Alors, bien évidemment, on peut comprendre la logique officiellement avancée, lorsque l’on s’apprête en tant que piéton à s’engager sur le passage clouté, il est plus sûr d’avoir une vue dégagée sur l’axe de circulation. De même les véhicules engagés sur cet axe peuvent mieux anticiper l’arrivée d’un piéton sur la chaussée s’il n’y a pas de véhicule stationnant avant le passage clouté.
Tout le monde peut suivre ce raisonnement, le problème -et l’occulter relève de la plus grande hypocrisie- c’est que cette mesure va conduire à la suppression d’un grand nombre de places de stationnement que de nombreuses agglomérations, à commence par Paris, vont bien évidemment s’abstenir de recréer.
Avec ce décret, sous couvert, de développement « de la pratique de la marche » c’est bien la chasse aux voitures qui se poursuit…